Movie Buff #5: La Vérité
Le procès pour meurtre de Dominique (Brigitte Bardot) une jeune femme de 22 ans s’ouvre avec le film. D’emblée, on nous présente une femme scandaleuse pour l'époque (1960), qui ne nie ni le meurtre qu’elle a commis ni le fait d’avoir des mœurs « légères ». L’accusation note : « elle va dans des cafés et jusqu'à 3 fois par semaine au cinéma, puis naturellement, elle prend un amant… » Effectivement, Dominique est sensuelle au possible. Elle reste au lit, danse nue sous les draps même si elle a de la visite, parle cru, est sexuellement très active. C’est un être complètement guidé par le plaisir, les plaisirs. Elle vit tout simplement comme une femme libre. Elle est issue d’une nouvelle génération complètement en rupture avec celle des barbons et des vieilles bourgeoises qui remplissent le tribunal. Comme le dit Michel, son ami: « elle devrait être jugée par des jeunes ».
Si la cour condamne Dominique pour son oisiveté et
son goût pour les bistrots, lieux de perdition où les représentants de jeune
génération se retrouvent, c’est qu’elle condamne en fait tous les représentants
de la Nouvelle Vague, ces jeunes gens qui fument, dansent, font l’amour,
et qui surtout ne « travaillent pas mais pensent ».
La victime du meurtre pour lequel comparaît
Dominique, Gilbert (Sami Frey), est d’ailleurs un homme célébré pour son goût
du travail acharné, qui veut rester dans les rails d’une vie toute tracée entre
succès professionnel et vie de famille en devenant un chef d’orchestre connu et
en épousant Annie (magnifique Marie-José Nat), la sœur cadette et sérieuse de
Dominique. Il s’égare pourtant dans les bras de la belle blonde et veut faire d’elle une « femme honnête ». Mais il s’abîme dans une jalousie de plus en plus profonde et dans la frustration de ne
pouvoir mettre en cage sa maîtresse, dont la seule raison de vivre est de ne
jamais penser au lendemain, mais qui aime follement son Gilbert, à sa façon.
Aucun des deux ne gagne finalement : le
procès est annulé à la mort de Dominique et les avocats se serrent la main comme
après un match nul au tennis.
Clouzot expose, donc, mais se refuse à juger.
Quant au spectateur, il constate simplement qu’une vie heureuse, qu’une vie
tout court même, n’est possible pour aucun des protagonistes. Ni dans la répression de ses désirs et la
recherche d’une vie « honnête » et convenue, ni dans la quête
inconditionnelle de liberté. Car l’une comme l’autre sont soumises à la réalité
de l’existence, à l’amour, au désamour, à l’ennui, à l’égoïsme et à la
souffrance.
La Vérité, d'Henri Georges Clouzot, 1960. Avec Brigitte Bardot, Sami Frey, Marie-José Nat...
La Vérité, d'Henri Georges Clouzot, 1960. Avec Brigitte Bardot, Sami Frey, Marie-José Nat...